Le défi d'Eric-Emmanuel SCHMITT ✍️ : de l'athéisme au christianisme 🙏

Le défi d'Eric-Emmanuel SCHMITT ✍️ : de l'athéisme au christianisme 🙏

Quel bonheur de découvrir qu'un de mes auteurs préférés, Eric-Emmanuel Schmitt, est l'invité d'honneur du Meeting de Rimini cette année. Connaissez-vous cet événement qui se déroule actuellement en Italie ? Fondé en 1980 par le mouvement catholique Communion & Libération, que j'ai eu la chance de découvrir grâce à mon épouse Letizia et à ses amis italiens, ce rassemblement est bien plus qu'un simple festival. C'est un véritable creuset où se rencontrent chaque été à Rimini, sur la côte adriatique, des personnes de toutes confessions, unies par un désir commun d'amitié et de fraternité entre les peuples. Imaginez, plus de 80 000 visiteurs se réunissent chaque année pour cet événement, relayé par la chaîne de télévision italienne RAI.

Je dois avouer que voir Eric-Emmanuel Schmitt sur cette scène me réjouit tout particulièrement, et pas uniquement parce qu'il est franco-belge. C'est surtout son parcours de foi, si intense et si profond, qui résonne en moi. Je m’explique…

Lors de mes recherches sur l'histoire de Jérusalem pour l'écriture de mon livre L'abondance tuera, un projet né après mon pèlerinage sur le chemin de Compostelle, j'ai découvert, par hasard, cet auteur que je ne connaissais alors pas du tout. C'est son livre Le Défi de Jérusalem qui m'a intrigué en premier lieu, avant que je ne dévore La Nuit de Feu et L'Évangile selon Pilate.

J'ai lu tous les livres d'Eric-Emmanuel Schmitt parce que son histoire me parle. Vous est-il déjà arrivé de vous sentir si proche des expériences d'un auteur que vous avez l'impression qu'il raconte votre propre vie ? Comme lui, j’étais athée au départ, nourri par une vision française et voltairienne de la vie, extrêmement sceptique envers toute forme de religion. Je ne croyais pas en Dieu et encore moins en Jésus et en Sa résurrection. Vous imaginez donc le "choc" lorsque Letizia, mon épouse, m'a introduit au mouvement catholique italien Communion & Libération en m'offrant un livre de Don Giussani, son fondateur. La première phrase m’a frappé de plein fouet : "Je suis la vérité", en parlant de Jésus. En France, un tel discours est insupportable et semble presque impensable. J'ai fermé le livre immédiatement, ces mots étaient même insolents pour moi. Et pourtant, il a suffi d'une épreuve, le handicap de ma fille Carolina, pour que, à 33 ans, je commence à m'ouvrir à Dieu, parce que je n'avais plus le choix.

Quant à lui, Eric-Emmanuel Schmitt a attendu 28 ans pour commencer à s'ouvrir. Philosophe, athée convaincu et très critique envers les religions, il a vécu une expérience décisive en 1989 lors d’une randonnée à pied dans le désert du Sahara. Perdu pendant une trentaine d’heures dans l’immensité du Hoggar, sans rien à boire ou à manger, ignorant où il est et si on le retrouvera. Cette nuit-là, sous les étoiles si proches, alors qu'il s'attend à frissonner d'angoisse, une force immense fond sur lui, Le rassure, L'éclaire et Le conseille. Une nuit qui a changé sa vie. "Je suis né deux fois, une fois à Lyon en 1960, une fois dans le Sahara en 1989" confessera Eric-Emmanuel Schmitt. De mon côté, ma renaissance a commencé en 2012, à mes 33 ans, avec la venue du handicap en famille.

Parti athée, Eric-Emmanuel Schmitt en reviendra "presque" croyant, dix jours plus tard. Je dis "presque" parce qu’accepter pleinement une telle révélation n'est pas simple, surtout pour un esprit aussi critique que le sien. Il a ressenti ce qu'il a décrit au Meeting de Rimini comme une rencontre avec le "Dieu de toutes les religions", mais il lui a fallu du temps pour vraiment digérer et comprendre cette expérience. Je le comprends à 100%. On souhaiterait tout oublier et revenir à la vie normale, mais ce n'est plus possible, cette force spirituelle est entrée en vous et Elle ne repartira plus. Comme je l'écrivais dans mon livre L'abondance tuera: « Quel cadeau mais aussi quelle responsabilité ! » Et je vous jure que c'est parfois très pesant cette force interne et ça peut aussi agacer votre entourage.

Justement, Eric-Emmanuel Schmitt ne racontera cette histoire que 26 ans plus tard, en 2015, dans son livre La Nuit de Feu. Pourquoi avoir attendu si longtemps pour témoigner ? Peut-être avait-il besoin de temps pour clarifier cette expérience avant de la partager. Avait-il peur pour sa carrière en France ? Il faudrait lui demander mais je comprends cette hésitation. Même après avoir vécu quelque chose d'aussi profond, notre esprit critique reprend souvent le dessus, nous poussant à nous questionner, à douter, à chercher des réponses concrètes. Mais comme me disait ma maman en 2014: "je ne sais pas qui sont Dieu et Jésus-Christ, mais je suis certain qu'ils ne vont pas te lâcher !". Elle avait raison. Et ce fut la même chose pour Eric-Emmanuel Schmitt je pense. Ainsi, en 2015, à 55 ans, il témoigne et prend le risque de se voir coller l'étiquette de "catholique" en France, pouvant lui fermer des portes pour sa carrière de réalisateur et écrivain. Mais je pense sincèrement qu'il s'en foutait. Le Mystère ou plutôt le "Dieu de toutes les religions" est entré en lui et Eric-Emmanuel Schmitt ne pouvait que témoigner ceci, c’était plus fort que lui, comme il l'a formidablement exprimé à Rimini.

Néanmoins, Eric-Emmanuel Schmitt et moi-même avons vécu un "christianisme intellectuel" après cette entrée de cette force spirituelle en nous. Vous n'empêcherez pas un bon "français voltérien" de reprendre son esprit critique et de questionner de nouveau ce moment pourtant magique, cette grâce. On ne se refait pas.

De mon côté, à 33 ans, je n'avais plus de doutes sur Dieu, mais Jésus-Christ était un autre sujet. A-t-il vraiment existé? Et est-il vraiment ressuscité? Cette histoire semble improbable. Alors, j'ai commencé à lire, à chercher des réponses. J'ai eu la chance d'aller 5 fois à Jérusalem pour mon travail et de sentir les pas de Jésus dans cette ville Sainte. En 2014 à Avila proche de Madrid, lors d'un événement organisé par Communion & Libération, j'arrive avec une question simple et forte: "Pourquoi avez-vous permis le handicap de ma fille Dieu et Jésus? C'est injuste!". Et comme vous le savez, lors de cet événement à Avila, je vois 3 prêtres célébrer la messe avec une mise en scène de Jésus au Mont des Oliviers. C'est trop fort pour moi, je ressens Jésus frapper à ma porte, un regard puissant qui me dit: "Crois-tu en Moi? Je sais que ce n'est pas la vie que tu souhaitais, mais crois-tu en Moi?" Jésus frappe à ma porte, je Le laisse rentrer, Il ne partira plus.

De son côté, à 29 ans, c'est aussi plus fort que lui, Eric-Emmanuel Schmitt doit aussi questionner la véracité de Jésus et de Sa résurrection. Il lit, il recherche, il questionne : "Comment le cadavre de Jésus a pu disparaître? C'est impensable !"  Ces lectures vont lui inspirer l'écriture du livre L'Evangile selon Pilate. Et plus il cherche, plus le Mystère se confirme, plus le Mystère est grand chez Eric-Emmanuel Schmitt. Mais son ressenti de cette force spirituelle reste pour lui aussi un "christianisme intellectuel". C'est dur de croire en Jésus-Christ pour un ancien philosophe très athée. Comme Eric-Emmanuel Schmitt l'explique très bien à Rimini, malgré l'entrée de cette force intérieure, il était encore un peu un Pilate ne comprenant pas comment Dieu puisse s'incarner en homme, et comment cette homme puisse mourir et ressusciter. 

L'Evangile selon Pilate est certainement mon livre préféré à ce jour, un peu provocateur, reprenant et romançant les Ecritures juives et bibliques, où Yeshua (Jésus) est même amoureux, où la femme de Pilate (Giulia) est conquise par le charisme de ce jeune Yeshua. Eric-Emmanuel Schmitt en fera une pièce de théâtre et au final, ce témoignage de foi, même si encore "intellectuel", va conquérir la France et l'Europe. Cela arrive aux oreilles du Vatican qui va lui proposer d'aller vérifier son Chemin de foi sur les traces de Jésus, à Jérusalem, car Eric n'était jamais allé sur cette Terre Sainte. Grâce à ce voyage, Eric-Emmanuel Schmitt va comprendre que son Yeshua est bien réel. Eric arrive enfin à mettre un visage concret sur cette force, ce Mystère, rencontrés en 1989: "le Dieu de toutes les religions". Il a ressenti lui aussi un regard puissant de Jésus, son Yeshua, au Sépulcre à Jérusalem. Eric-Emmanuel Schmitt le témoigne parfaitement à Rimini: "C'était un regard sur moi, puissant, un cadeau d'Amour, fait par Amour. Mon corps a compris ce qu'intellectuellement je ne peux pas expliquer. Je ne comprends toujours pas comment Dieu peut se faire homme, comment Jésus peut mourir et ressusciter, mais pourtant Il est là, dans mon corps. Je ne veux pas d'explication de ce Mystère, je veux juste Le fréquenter, Le vivre."

Je ne saurais mieux exprimer ce que je ressens : c’est exactement cela ! Imaginez-vous, un athée convaincu, un "français voltairien", traversant la vie sans aucune croyance divine. Puis, un jour, une force spirituelle surgit en vous, souvent à travers une épreuve bouleversante. Vous êtes déconcerté, secoué jusqu’au plus profond de vous-même, et vous réalisez que c'est Dieu, le Dieu de toutes les religions. Vous devenez croyants, malgré vous. Mais, ensuite, les doutes reviennent. Votre foi, bien qu'authentique, reste ancrée dans la réflexion spirituelle et intellectuelle. Eric-Emmanuel Schmitt et moi-même avons vécu ce cheminement je pense. La vie nous a offert le « cadeau » d'aller à Jérusalem, et là vous sentez Jésus, vous voyez Ses traces, vous croyez en Dieu et en Jésus, mais vous avez encore du mal à L'appeler le "Fils de Dieu", car pour cela il faut croire en cette histoire improbable de Sa résurrection.

Vous n'aurez jamais la réponse, plus vous chercherez et plus le Mystère sera grand et se confirmera. Alors, à un moment de votre vie, la grâce peut arriver avec un face à face inattendu avec Jésus-Christ en personne. Dois-je Lui ouvrir la porte? Si vous le faîtes, vous ne pourrez plus revenir en arrière. Il est en vous, chez vous et Il ne partira plus comme me le mentionnait ma maman. Votre "christianisme spirituel, intellectuel, philosophique" devient un "christianisme carnal, physique, concret" comme Eric-Emmanuel Schmitt a su l'expliquer à Rimini. Votre foi, qui était jusque-là spirituelle, intellectuelle, presque philosophique, devient alors une réalité vivante, concrète, incarnée. C'est magique mais aussi bouleversant !

Jérusalem est une ville unique, une véritable énigme sacrée. Elle peut vous aider à mettre un visage sur Dieu et vivre le chemin du christianisme. Mais Jérusalem ne se contente pas de cela. Elle va bien plus loin, elle incarne ce qu’Eric-Emmanuel Schmitt appellera à Rimini: "la provocation terrestre de Dieu". Eric-Emmanuel Schmitt l’a exprimé avec une force particulière lors du Meeting de Rimini : "Certes, Jérusalem m'a appris à être un chrétien non plus intellectuel, mais concret, charnel. Mais elle m’a aussi enseigné à respecter et à considérer comme mon frère le musulman, le juif ou l'athée. Jérusalem est une terre où Dieu a dit aux hommes avec un peu d'insolence "entendez-Moi"; et qui dit aujourd'hui à ces mêmes hommes avec un peu d’humour "entendez-vous !".

J'ai été particulièrement frappé par l'introduction d'Eric-Emmanuel Schmitt dans son livre Le défi de Jérusalem : "Si tu comprends quelque chose à la situation de Jérusalem aujourd'hui, c'est qu'on t'a mal expliqué." Cette phrase résume à merveille la complexité inextricable de cette ville, c'est une terre promise mais on ne sait pas à qui elle est promise. Dans son ouvrage, Eric-Emmanuel Schmitt décrit Israël et la Palestine comme "l'affrontement de deux légitimités". Deux camps qui s'opposent, mais qui ont tous deux raison. Il ne s'agit pas d'un simple combat entre le bien et le mal, ou entre le vrai et le faux. C'est bien plus profond : ce sont deux vérités qui, paradoxalement, s'excluent mutuellement. "Israël a raison, la Palestine a raison", écrit-il.

Pour résumer, Schmitt rappelle qu'Israël a reçu cette terre en tant que promesse divine. Cependant, après avoir été chassés par les Babyloniens en 587 avant Jésus-Christ, puis par les Romains en l'an 70, les Juifs ont été exilés pendant près de deux millénaires. Pendant ce temps, d'autres peuples se sont installés sur cette terre, vivant sous l'Empire romain, puis sous l'Empire ottoman, et sont devenus majoritairement musulmans, parlant arabe ou turc. Lorsque l'État d'Israël a été proclamé en 1948 avec le soutien de l'ONU, ces populations, considérant cette terre comme la leur depuis des siècles, ont rejeté cette proclamation. Et ainsi, un cycle tragique s'est répété : les Juifs, autrefois expulsés par les Romains, sont revenus et ont à leur tour chassé ceux qui occupaient cette terre depuis des générations. Ainsi, dans ce conflit actuel, comme le souligne Schmitt: "Israël a raison, la Palestine a raison." Bien entendu, je ne souhaite en aucun cas choquer qui que ce soit en exprimant cela, mais je dois dire que je partage cette vision.

Je suis également convaincu que Jérusalem est la clé de l’humanité. Cette ville, avec toute sa complexité et sa charge spirituelle, semble être le théâtre où se joue la provocation "mondiale" de Dieu. Tandis que la provocation "individuelle" de Dieu se manifeste quotidiennement dans nos cœurs, c’est à Jérusalem que Dieu semble adresser un appel plus vaste à l'humanité. N’est-il pas significatif que Dieu ait choisi cette ville pour y faire venir Jésus, pour qu’Il y meure et y ressuscite ? Aujourd'hui encore, il me semble que Dieu est présent au cœur du conflit qui secoue Jérusalem. Comme l’a si bien expliqué Eric-Emmanuel Schmitt lors du Meeting de Rimini: "Dieu nous demande la fraternité dans cette ville, où toutes les religions vivent ensemble. Et au lieu de nous unir en ayant le même regard vers Lui, on se divise et on se déchire." Cette réflexion me pousse à me questionner : sommes-nous capables de répondre à cet appel divin à l’unité et à la fraternité ? Ou allons-nous continuer à nous laisser emporter par les divisions et les conflits, perdant ainsi de vue L’Essentiel ?

Je partage exactement cette vision. La fraternité est notre point commun en tant qu'humanité. C'est ce lien qui nous pousse à nous poser la question de Dieu, à nous interroger sur cette force mystérieuse qui semble guider nos vies. Mais chacun doit y répondre à sa manière, selon sa religion, son parcours, son Chemin. Il est crucial que nous nous interrogions tous sur le sens de la vie. Plutôt que de nous éloigner de cette question fondamentale, nous devrions chercher à fréquenter ce Mystère, à l'explorer, à le comprendre. Malheureusement, l'éloignement actuel de cette question essentielle nous conduit sur un chemin qui n'est pas le nôtre. L'homme se perd, s'entretue même, et c'est là le véritable mal de l'humanité.

Pour moi, c'est en nous interrogeant sur cette question vitale que nous pourrons nous rapprocher les uns des autres, dans un esprit de fraternité. Cette question concerne chacun de nous, et il revient à chacun d'y répondre. C'est en cela que réside la clé de l'humanité, dans cette quête commune de sens qui, loin de nous diviser, devrait nous unir.

L'homme reste libre face à cette Question, et je crois profondément que Dieu acceptera notre réponse collective, quelle qu'elle soit, comme je l’écrivais dans mon livre L’abondance tuera. Comme Eric-Emmanuel Schmitt, je suis convaincu que cette Question, si cruciale, est de nouveau posée au monde entier, et une fois encore à Jérusalem.

Dieu nous interpelle, Il nous provoque à nouveau, parfois avec humour, parfois avec insolence, et Il attend de nous une réponse humaine collective, une réponse qui déterminera l'avenir de notre humanité. C'est un moment décisif je pense où notre liberté et notre fraternité sont mises à l'épreuve. Il ne s'agit plus seulement de choisir individuellement notre Chemin, mais de réfléchir désormais ensemble à cette Question, pour tracer une voie humaine qui pourrait bien être celle de notre salut commun… ou alors de notre fin si tel est le choix de l'homme.


Reynald NAULLEAU

 

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